Dans l’aube de sa quinzième année, la porte des secrets s’ouvrit pour Gerardo, en changeant sa vie pour toujours.

La veille, il avait quitté son village, son père l’entrainant dans les hauteurs de la forêt pour rejoindre la cabane où vivait un vieux chamane au regard dur mais aux silences féconds : son grand-père.

Gerardo avait peu croisé cet homme qu’on disait aussi puissant que solitaire.

– Il t’apprendra, lui dit son père, à devenir Homme-Sorcier qui protège et qui soigne… Car ton destin fut scellé par nos ancêtres bien avant ta venue au monde…

Dans la pénombre de la hutte qui sentait la vieille fumée, le garçon retenait ses larmes. Il contempla le visage ridé où brûlaient deux yeux de chouette qui l’observaient intensément. Au soir, Gerardo se roula dans le ventre du hamac, s’endormit.

Avant le lever du jour, une main le tirant d’un profond sommeil secoua son épaule inerte. Dehors la lune était pleine.

– Lève-toi ! dit la voix de l’Ancien dressé sur le seuil de la porte.

Gerardo suivit le chamane plus haut encore sous les arbres noirs. Avec les premières lueurs, ils atteignirent le sommet, un autre versant de montagne, encore une forêt… Trois jours durant, ils marchèrent longeant le fleuve Amazone. Après un long voyage aussi austère que silencieux, le vieil homme s’arrêta sur un flanc de montagne désertique.

– Maintenant, creuse ! lança-t-il au garçon, qui n’avait qu’une hâte, rentrer auprès des siens.

L’enfant regarda à droite, à gauche, puis ne sachant où fouiller la terre, il gratta le sol sous ses pieds alors. Son grand-père s’était éloigné pour scruter l’ombre dansant d’un buisson.

« Il est fou ! » se dit le garçon tirant sur de vieilles racines. Mais soudain, sous ses doigts, la joie, le bonheur ivre ! Un morceau de quartz, un second commencent à briller sous ses yeux. Les pierres avaient un pouvoir qui l’intriguaient depuis toujours.

« Et ce sont celles que je préfère en plus ! » cria le garçon à son grand-père !

– Il y en a partout sur ces terres. Choisis celle qui t’appartiendra, dit l’Ancien.

Gerardo déterra d’innombrables quartz au cours de cette inoubliable journée ! Puis, à l’instant de partir, il désigna fièrement le plus gros :

– Je vais garder celui-ci ! On n’en a jamais vu de pareil ! Je suis riche hé hé hé !

– Rentrons alors, acquiesça son grand-père.

Gerardo souleva la pierre pour la tenir entre ses bras. Elle brillait autant que ses yeux d’enfant comblé comme un roi. Marchant l’un après l’autre, ils prient le chemin du retour mais bientôt, Gerardo vit le vieux monsieur, pas alerte et vigoureux, le devancer… : il chantait la beauté du jour, en allégresse légère…

Le long du sentier descendant, la pierre de Gerardo serré contre son corps se mit à peser, un peu, beaucoup, douloureusement… elle était de plus en plus lourde. Ses mains se crispèrent. Ecorchées par le tranchant du minéral, ses bras tremblèrent… Entraîné par son propre poids, les lanières de cuir de ses sandales étaient sur le point de craquer. A la limite de la rupture, ses bras n’en pouvaient plus…

D’épuisement, ils transpirait à grosses gouttes… Il serra les dents encore un temps, mais il n’en pouvait plus et il lâcha tout ! Il s’effondra au milieu des herbes, ses joues inondées de pleurs, incapables de reprendre son souffle.

– Regarde, voici la pierre que j’ai choisie, dit l’ombre du vieux chamane soudain penché sur son épaule. L’homme au regard de chouette fouilla dans sa poche et il en sortit un tout petit caillou qu’il tenait au creux de sa main.

– L’avidité n’est jamais bonne conseillère ! Tu aimais ta pierre et maintenant tu la maudis ! Tu la portais et elle te porte. Elle te pèse, tu ne pouvais pas choisir plus mal… Il en sera toujours ainsi de tes amours, de tes rêves, de tes actions, de tes désirs, de tes prières…

Choisis en fonction de ce tu peux porter et ne demande pas davantage !

La route de la vie est longue, mon garçon !

Apprends à reconnaitre de tes désirs, ceux qui sont trop lourds pour tes forces ! Apprends à te mesurer, à renoncer pour choisir juste.

Maintenant, viens ! Remontons et trouvons le caillou qui t’appelle !

== Alors la clé de nos réussirs dans nos vies : de la juste mesure dans les désirs de nos agirs !

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